samedi 1 décembre 2012

Atelier 2012-2013: "L'Etat en Amérique Latine: transformations, recompositions et redéploiements"

Idéalisé comme l’apparente incarnation d’un nouveau modèle de gouvernance « post-néolibéral » (Grugel & Riggirozzi, 2012), ou décrié pour sa dépendance à une économie extractive (Hogenboom, 2009) et aux intérêts d’une nouvelle élite politique jugée peu regardante des « impératifs  démocratiques » (souvent dénoncée par ses pratiques « populistes »), l’Etat en Amérique Latine suscite beaucoup de débat parmi ceux soucieux d’interpréter ses transformations actuelles. Tant dans les milieux académiques que dans les champs politiques et médiatiques, les avis s’opposent quant à la performance des institutions étatiques et le niveau de « consolidation démocratique » dans la région. En effet, au cours de cette dernière décennie la plupart des pays d’Amérique Latine ont traversé une période marquée (à différents degrés) par une restructuration des champs politiques locaux avec l’arrivée des partis de gauche au pouvoir, et une reformulation de la structure institutionnelle étatique. Les cas du Venezuela, de la Bolivie et de l’Equateur semblent les plus exemplaires à cet égard à la suite de processus de réforme constitutionnelle.

L’objet de l’Etat en Amérique latine a été notamment investi par la recherche américaine, tandis que la recherche latino-américaine commence à se démarquer et que la recherche française demeure encore assez timide avec quelques exceptions (Dezalay & Garth, 2002 ; Dabène, 2012). Les travaux académiques américains ont largement contribué  à diffuser deux approches qui ont traditionnellement dominé cet objet d’étude. D’une part, l’Etat est analysé au prisme de sa transition et de sa consolidation démocratique (Linz & Stepan 1978 ; O’Donnell & Schmitter 1986 ; Huntington, 1991 ; Przeworski, 2005). Dans le prolongement de cette approche, il est question principalement d’examiner, comparer voire mesurer la qualité démocratique (PNUD, 2005) à partir d’indicateurs présentés comme « objectifs » à savoir  la participation citoyenne (débat entre démocratie participative et populisme), les libertés publiques (les médias) et la reconnaissance des droits (droits de l’environnement, droits des populations ancestrales), la concentration des pouvoirs (nouveaux mécanismes d’équilibre institutionnel vs. présidentialisme). D’autre part, l’Etat est appréhendé par le prisme de son économie politique (« Political economy analysis ») : il s’agit ici d’étudier les interactions entre les processus économiques et politiques dans un contexte social déterminé, la distribution des pouvoirs et des richesses entre les différents acteurs impliqués ainsi que les processus permettant la création, le maintien et/ou la transformation de ces relations. Dans cette perspective, une place importante est accordée aux « intérêts » (« incentives ») des acteurs en lice et aux mécanismes déterminant leurs choix d’action (« rational-choice » ; « game theory »). De plus, les politiques économiques seront évaluées par leur « performance ».

Toutefois, la recherche sur l’Etat en Amérique latine tend vers une routinisation, d’une part,  méthodologique (prédominance de méthodes quantitatives au détriment d’analyses qualitatives appuyées sur l’observation ethnographique, travail sur archives documentaires et sur entretien) et d’autre part conceptuelle avec une application systématique de schèmes d’explication ou de catégories d’analyse (« modernization», « democratic consolidation », « regime breakdown »). Par ailleurs, l’introduction de nouveaux schèmes conceptuels ne s’accompagne pas forcément d’une discussion théorique créant seulement des labels pour caractériser un Etat à un moment donné de sa quête de développement. On pense ici, par exemple, aux travaux sur l’émergence d’un « Etat post-néolibéral » en Amérique latine - (Kennemore & Weeks, 2011).  Ceci traduit une certaine forme de tâtonnement théorique parmi les chercheurs mais également parmi certains experts de think-tank américains ou d’organismes internationaux qui tentent d’appréhender ces nouvelles réalités non sans considérations normatives.

L'atelier du GELS* de cette année aura donc pour thème « l’Etat en Amérique latine, entre transformations, recompositions et redéploiements ». Faisant échos aux débats contemporains et dans un souci d’enrichissement de la réflexion française sur ce thème, l’atelier aura pour objectif de confronter les différents modes d’analyses de l’Etat aux réalités latino-américaines mais également de pousser la réflexion en mobilisant en particulier des catégories et des méthodologies d’analyses propres à la sociologie politique française. Il sera question d’appréhender ce thème sous trois axes principaux :
  1. Penser l’Etat à partir de ses institutions ;
  2. Les rapports des citoyens à l’Etat et aux acteurs qui l’incarnent (avec un intérêt sur la politisation et la réappropriation du politique) ;
  3. L’exportation et l’importation de pratiques d’Etats de et vers l’international
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